Je suis née à Zinder, en l’an 2000, mais ma mère ne se souvient pas exactement de quel mois… Elle m’a dit que c’était une journée où il faisait très chaud. Mais au Niger, il fait 40° à 50° les ¾ de l’année…
J’ai 5 frères et sœurs et je suis la 3ème.
A l’âge de 2 ans, on m’a pronostiqué de l’émacie. J’étais souvent affaiblie, en manque de globules blancs… Ma maman s’est toujours bien occupée de moi, avec les petits moyens qu’elle trouvait auprès du voisinage ou en vendant de la bouillie devant notre petite case en banco traditionnel. Les cases en banco sont faites de sable, de terre, de paille et d’eau et assurent une bonne étanchéité lors des saisons des pluies et retiennent la fraicheur lors des grosses chaleurs.
Mon père est décédé en 2007. Il se plaignait de maux de dents. Puis, une infection généralisée a eue raison de son corps malade. Mes parents n’avaient pas d’argent, nous vivions au jour le jour, comme la majorité des gens autour de nous. Ne pouvant pas se rendre dans un dispensaire pour se faire soigner, mon père s’est couché sur sa natte, par terre, et il a attendu 3 jours l’heure de son départ. La mort fait partie de notre quotidien et de notre culture. Nous l’acceptons et la fêtons, comme les naissances.
En 2010, en allant rendre visite à de la famille dans la brousse avec ma mère, je suis tombée du taxi-moto qui roulait trop vite et qui a glissé sur le sable. Ma mère n’a heureusement rien eu, sauf 2-3 coupures. Pour ma part, je ne pouvais plus me relever… Une douloureuse fracture de ma jambe m’a obligée, dès ce jour, à rester assise sur une natte, devant la porte de notre maison ou à l’intérieur quand le soleil brûlait trop fort. J’ai pu bénéficier d’un plâtre dans un dispensaire d’urgence de la ville de Zinder. Puis, par manque d’argent, je me suis habituée à ne pas me plaindre et à rester assise devant notre petite case en banko, me trainant à terre pour aller des toilettes à mon tapis, qui me servait de couche.
Par un brûlant après-midi de mai 2011, Isabelle est arrivée avec un instituteur de son école. Elle avait entendu parler de mon état physique et souhaitait me rencontrer.
Rapidement, une 2ème visite avec son chef technique de la Suisse, qui deviendra mon Parrain, a eu lieu. Cette fois, ils m’apportaient une chaise roulante ! Je pouvais enfin, après 2 ans sans me redresser, m’asseoir dans une chaise roulante, enfin bouger et bénéficier d’un horizon plus vaste !
Une année plus tard, la chaise roulante a fait place à des béquilles et à un atèle que je porte encore aujourd’hui, pour m’aider à redresser et bouger ma jambe encore un peu endormie.
Depuis le printemps 2014, je n’ai plus besoin des béquilles et je me sens maintenant comme mes autres camarades au Centre d’Accueil et de formation «Après-demain» de l’Association !
Je participe aux travaux de nettoyages du Centre et à la cuisine. Ainsi je reçois une petite indemnité tous les vendredis, ce qui me permet d’aider ma maman pour l’achat de denrées alimentaires et pour notre hygiène.
J’ai même pu acheter une chèvre «rousse de Maradi», les meilleures pour le lait et la reproduction. Ma chèvre a déjà fait 2 petits et nous pouvons ainsi espérer un troupeau d’ici 2 à 3 ans. Nous avons du bon lait tous les jours et nous faisons de la bouillie pour le soir, en rajoutant du sucre, du gingembre et du son.
Je suis bien entourée et soignée au Centre «Après-demain», ce qui me permet de stabiliser ma santé et gagner en confiance. L’infirmière du Centre me donne des médicaments pour l’émacie et surveille mon poids. J’ai pris quelques kilos ces 3 dernières années et j’espère encore en prendre 10 pour me sentir vraiment bien! Quand Isabelle m’a emmenée à son école la première fois, je pesais 27 kg et j’avais 11 ans.
J’apprends tous les jours de nouvelles choses à l’école avec mon instituteur et j’aimerais devenir la future infirmière du Centre, pour aider à mon tour les futurs enfants orphelins qui seront accueillis dans les prochaines années.
Si mes notes seront suffisantes, je passerai mon examen cet été 2015 pour aller au Collège de Zinder, comme les 9 autres filles du Centre qui y sont déjà pour leur 1ère année de Collège.
Je veux réussir, car j’ai besoin de redonner un peu de tout ce que j’ai reçu ces dernières années. C’est bien quand on a la santé et qu’on peut remarcher !
Mariama Moussa, 15 ans et 33 kg.
A l’âge de 12 ans, je pesais 23 kg…. |